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Que faire après la troisième ? L’orientation scolaire et professionnelle vue par la télévision scolaire

Au début des années 1970, les questions liées à l’orientation scolaire et professionnelle des élèves sont au centre des préoccupations. L’Éducation nationale veut renforcer l’information, le dialogue et la concertation au sein du système éducatif. Dans cette perspective, la télévision scolaire consacre plusieurs séries d’émissions destinées à accompagner les familles et les jeunes dans leur choix d’avenir.

En raison d’une croissance rapide et massive du nombre d’élèves scolarisés à partir des années 1950 (augmentation des naissances, scolarité obligatoire prolongée jusqu’à 16 ans), des réformes successives ont été menées pour répondre aux problématiques que cette « Explosion scolaire » [1] imposait. Au cours des années 1960, l’orientation scolaire des élèves est devenue un enjeu auquel il a fallu tenter répondre. Après mai 1968, dans le cadre de la continuité d’une politique de rénovation pédagogique et pour répondre aux insuffisances du système, de nouvelles directives sont développées.

La série : Information pour l’orientation scolaire et professionnelle
 

Dans cette volonté de communication, la télévision scolaire a proposé des émissions sur le sujet dont la série : Information pour l’orientation scolaire et professionnelle produite entre 1970 et 1972. Elle est composée de 15 programmes destinés aux élèves de 14 à 17 ans.

« Cette information doit s’adresser à un ensemble professeur-parents-élèves car tous ont leur mot à dire dans le processus d’orientation et tous ressentent le besoin d’être informés. La classe ne sera donc pas le seul lieu de réception de nos émissions : on parlera plutôt de points d’écoute. »

Dossiers pédagogiques de la radio-télévision scolaire, présentation de la série, 1970 - OFRATEME, p.60 

 

Cette opération qui encadre la diffusion de cette série a été réalisée en collaboration avec les équipes de l’O.N.I.S.E.P (l’Office National d’Information Sur les Enseignements et les Professions), cet établissement public créé en 1970 [2], constitue un des éléments de la réforme sur l’orientation.  

Une nouvelle série, pourquoi ? réalisé par Serge Lemkine (1970-OFRATEME) - 25 min.

Diffusée le 9 novembre 1970, sur la 1ère chaîne, le premier numéro de cette série est une émission de présentation et d’échanges.

Présentation de la série, livret destiné aux animateurs de points d’écoute, 1970 - OFRATEME, p. 5.

 

Dans le cadre d’un débat, les six premières minutes de l’émission mettent en évidence les interrogations des élèves quant aux moyens mis à leur disposition pour s’orienter. Ils pointent du doigt les inégalités sociales et territoriales existantes et demandent à avoir accès aux informations indispensables pour faire un choix éclairé. Cette introduction est un extrait du programme « Après le bac », qui sera diffusé dans la même série, elle permet d’appuyer les propos du présentateur, Paul Géron, qui va expliquer en détails les objectifs des différents épisodes qui seront proposés, il s’adresse à une élève qui vient d’entrer en 3ème et précise :

« ce que l’on veut, dans ces émissions, c’est apporter par des reportages une meilleure connaissance du monde économique et professionnel mais surtout pas faire de la propagande pour tel ou tel métier. […] La télévision n’est pas destinée à remplacer le livre ou le travail personnel, pour nous ces émissions, sont destinées à déclencher, chez les adolescents ou adolescentes, une recherche d’informations. »

Quelques titres de la série : Les hommes de Lacq, A la découverte d"une profession : les métiers de l'entretien des vêtements, Je voudrais m'occuper d'enfants, Artisanant quand même, Les débouchés de l'enseignement économique et commercial, Les métiers des arts graphiques... 

Le sujet de l’orientation des garçons et des filles sera également abordé, avec une émission spécifique sur le travail des femmes : « Traditions – Préjugés – an 2000 » :

 

« Le public en général, et les intéressées en particulier, ignorent trop souvent qu’une circulaire ministérielle du 10 novembre 1966 ouvre aux jeunes filles les portent de tous les établissements de l’enseignement technique, dont un certain nombre leur étaient fermées jusqu’alors. Peut-on parler avec optimisme de la promotion féminine ? »

Livret déstiné aux animateurs de points d'écoute, fiche d'accompagnement de l'émission, 1970 - OFRATEME, p.9

 

A noter que le support film 16mm de ce titre est absent des collections conservées par Réseau Canopé. A ce jour, il n’existe que le document d’accompagnement, édité à l’époque, pour témoigner de cette production. Sur le même sujet, vous pouvez retrouver, sur le catalogue des archives audiovisuelles en ligne, l’émission « Métiers masculins ? Métiers féminins ? » diffusée en 1973 dans la série « Informations pour l’orientation ».

La série Information pour l’orientation scolaire et professionnelle a été pensée pour être associée à des points d’écoute afin de pouvoir, à la suite de la diffusion, échanger et débattre sur les sujets évoqués : « Une émission reçue sans discussion ni exploitation est pratiquement inutile ». L’objectif était, entre autres, de répondre aux interrogations ou aux inquiétudes des élèves notamment ceux en classe de troisième dont le choix de l’orientation est un enjeu important.

Que faire après la troisième ?

Au début des années 1970, le collège unique n’est pas encore adopté (Réforme Haby de 1975), l’organisation des voies scolaires n'était différente.

Dossier de la radio-télévision scolaire : Les voies scolairesFévrier 1971, p. 29

Toujours dans la série : Information pour l'orientation scolaire et professionnelle, la télévision scolaire programme une suite de trois émissions intitulées « Que faire après la troisième ? » , mettant en avant le rôle du conseiller d'orientation [3]

 

En voix off, de manière assez formelle, l’introduction de la première émission annonce le sujet :

« Aujourd’hui en classe de troisième, la conseillère d’orientation vient faire passer des tests, dont elle communiquera bientôt les résultats aux élèves, aux parents et aux professeurs. Cette journée est l’occasion de poser nettement à l’ensemble de la classe les problèmes d’orientation. Les résultats scolaires joueront un rôle essentiel dans la décision. Les parents exprimeront leurs intentions, les goûts, les intérêts, les aptitudes, les projets des jeunes seront aussi pris en considération. »

Le programme commence pendant une séance, en classe entière, avec la conseillère d'orientation. Elle donne les consignes du test psychométrique qu'ils s'apprêtent à passer afin d'évaluer leurs aptitudes. 

Que faire après la troisième ? I. Réalisé par Dominique Brillaud (1971-OFRATEME) - 29 min. 

 

Un rappel est ensuite fait sur tous les moyens d'information qui seront mis en place durant l'année scolaire : entretiens individuels, visites d'établissements, émissions de la télévision scolaire ou encore des séances collectives d'information. Puis, les élèves posent leurs premières questions : 

« J’aimerai connaître les différents métiers qu’offrent les mathématiques ? » ; « J’ai 16 ans, mon âge peut-il poser des problèmes pour mon entrée en seconde ? » ; « Quelles carrières peut-on envisager à partir du français et des langues ? » ; « Quels sont débouchés possibles pour une jeune fille en maths techniques ? »

Au cours de ces trois émissions, le téléspectateur va suivre les témoignages de plusieurs élèves, suivant un cursus général ou professionnel, ils sont interrogés sur leur parcours scolaire. Ils racontent leur expérience, les difficultés rencontrées, leurs inquiétudes mais aussi les points négatifs et positifs des démarches parfois compliquées à mener lorsque l'on est adolescent.

 

Que faire après la troisième ? II. et III. Réalisés par Dominique Brillaud (1971-OFRATEME)

Si certains ont une idée précise des études qu'ils souhaitent poursuivre, d'autres ont plus de difficultés à se projeter et s'il est primordial d'être sensibilisé au choix de son orientation, l'élève n'est pas seul le décisionnaire. En effet, le processus repose principalement sur l'avis du conseil de classe de fin de 3ème. 

Dans l'émission "Le choix" réalisée en 1974, la question du choix professionnelle des jeunes est abordée, de manière plus informelle. Tournée en partie dans un parc de Saint-Germain-en-Laye, elle donne la parole aux adolescents. Moins contraints par le cadre scolaire, des trois émissions précédentes, "Que faire après la troisième", une bande de lycéens s'exprime plus librement leur vision de l'avenir. 

 

Marie-Christine, Marc, Martine, Frédérique, Brigitte, Gilles et Eric sont confrontés au choix de l'orientation parfois en décalage avec leurs souhaits. Ils évoquent l'importance de cette décision, leur rapport à l'école, aux enseignants, à la famille et au monde du travail. 

Le choix, série : Information pour l'orientation, réalisé par Serge Huet (1974-OFRATEME) 27 min. 

 

À la question « Quels sont les problèmes d’un adolescent ? », ils répondent presque tous en chœur : « Être compris par un adulte ». Tour à tour, ils évoquent le choix d’orientation qu’ils ont dû faire, les difficultés rencontrées, les doutes traversés et, pour certains, les études auxquelles ils ont renoncé. En parallèle de leurs témoignages, les parents sont également interrogés sur le rôle qu’ils ont joué dans les décisions concernant l’avenir scolaire et professionnel de leurs enfants.        

Dans un contexte post-1968, les séries et émissions de la télévision scolaire, du début des années 70, participent à diffuser une approche plus « psychopédagogique » de l’orientation. L’élève est encouragé à devenir acteur de ses choix, à travers un accès renforcé à l’information et au dialogue. Mais au-delà des parcours individuels, l’orientation scolaire et professionnelle reste un enjeu politique et sociétal majeur, car elle reflète et dépend des choix institutionnels opérés dans les domaines de l’école, de la formation et du travail.

[1] « L’explosion » scolaire. Cros (L.), Paris, Publication du Comité Universitaire d’information pédagogique, 1961

[2] En 1970, l’ONISEP a pris la suite du B.U.S : Bureau universitaire de statistiques créé en 1933.

[3] Le développement de la profession de conseiller d’orientation est lié à celui de la psychologie, discipline fondatrice du métier. En 1991, un décret réforme le corps des conseillers d'orientation et leur donne l'appellation de conseillers d'orientation-psychologues. En 2017, les COP sont devenus psychologues de l'éducation nationale, spécialité éducation, développement et conseil en orientation scolaire et professionnelle.

Emissions, sur le même sujet, disponibles sur le catalogue des archives audiovisuelles :

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publié le 23/05/2025